Cumul des mandats, prévention des conflits d’intérêts : des propositions à la hauteur des attentes. Bravo à la Commission Jospin !

Suite à la publication aujourd’hui du rapport de la Commission Jospin, nous tenons à saluer des propositions ambitieuses, conformes aux engagements pris par François Hollande en matière de cumul des mandats, de prévention des conflits d’intérêts et de contrôle citoyen. De manière inédite, la Commission va jusqu’à prévoir la possibilité d’une « alerte éthique » en matière de conflits d’intérêts, une proposition défendue par notre association depuis plusieurs années.

Les propositions de la Commission Jospin se révèlent donc à la hauteur de l’enjeu : garantir l’exemplarité des responsables publics afin de renforcer la confiance des citoyens envers leurs élus et institutions.

Nous appelons maintenant le gouvernement et les parlementaires à reprendre l’ensemble de ces propositions dans les textes qu’ils auront la charge d’élaborer, de discuter puis de voter. Il en va du rétablissement de la confiance des citoyens envers leurs élus et institutions.    

Mettre fin au cumul des mandats

Reprenant l’engagement du Président de la République, la Commission Jospin propose de mettre fin au cumul des mandats. Selon elle, un parlementaire ne devrait pas pouvoir cumuler son mandat avec un mandat exécutif local, ni avec des fonctions dérivées [1]. En cas de cumul avec un mandat local simple, les parlementaires ne devraient percevoir aucune indemnité.

Concernant les membres du gouvernement, la Commission va plus loin et propose d’interdire le cumul de fonctions ministérielles avec tout mandat local. Pour la Commission en effet, « un ministre ne doit pas donner l’impression que certaines de ses décisions pourraient être influencées par la prise en compte d’un intérêt local. »

Pour une « stratégie globale de prévention des conflits d’intérêts »

En matière de prévention des conflits d’intérêts, la Commission Jospin rejoint, pour l’essentiel, nos recommandations ainsi que celles formulées par la Commission Sauvé en janvier 2011. Mais alors que cette dernière s’intéressait uniquement aux membres du gouvernement et aux hauts fonctionnaires [2], la Commission Jospin a inclus dans sa réflexion les parlementaires ainsi que les titulaires de certains emplois publics supérieurs de l’Etat [3] et les membres et principaux responsables d’autorités administratives indépendantes.

Commençant par définir la notion de conflit d’intérêts,  la Commission Jospin propose l’adoption d’une loi sur la prévention des conflits d’intérêts, mais souligne aussi la nécessité de promouvoir le développement des bonnes pratiques. Comme nous l’avions indiqué dans nos recommandations, un dispositif de prévention des conflits d’intérêts efficace doit en effet combiner l’adoption, par la loi, de nouvelles obligations et sanctions, mais aussi la mise en place de règles déontologiques.

Parmi les principales mesures que la Commission propose d’adopter, saluons notamment :

– La création d’une Autorité de déontologie de la vie publique [4] et d’un réseau de déontologues dans chaque administration ou institution. Chargée de contrôler les déclarations d’intérêts des responsables publics, cette Autorité aurait également une mission de conseil et pourrait publier des recommandations.

– Un renforcement du régime des incompatibilités pour les membres du gouvernement (incompatibilité avec « toute fonction de direction ou d’administration au sein d’un parti politique et de toute autre personne morale ») et les parlementaires (notamment, l’accès à la profession d’avocat en cours de mandat ne sera plus autorisé).

– La publication de déclarations d’intérêts et d’activités par les membres du gouvernement et les parlementaires. Ces déclarations renseigneraient, en prenant en compte les cinq dernières années, les intérêts détenus, directement ou indirectement (dont les intérêts détenus par des membres de l’entourage proche), ainsi que les activités ou fonctions exercées. Notre association demande que le contenu de ces déclarations d’intérêts soit aussi précis que possible et complété par une information publique portant sur les revenus et avantages tirés de ces activités.

– Enfin, nous souhaitons saluer tout particulièrement la proposition concernant la mise en place d’un dispositif d’« alerte éthique » devant permettre à toute personne identifiant un possible conflit d’intérêts de s’adresser aux autorités compétentes (d’abord les déontologues, puis l’Autorité de déontologie en cas d’absence de réponse).

Il s’agit maintenant de traduire ces propositions en actes à l’issue d’une concertation que nous souhaitons la plus ouverte et constructive possible. Afin d’y contribuer, nous organiserons un grand débat public le 5 décembre prochain à l’occasion de la journée mondiale des Nations unies contre la corruption.



[1] Membres des assemblées délibérantes des établissements publics de coopération, membres de conseils d’administration ou de surveillance d’établissements publics locaux, de sociétés d’économie mixte locales, de sociétés publiques locales ou autres organismes dans lesquels siègent des membres des  assemblées délibérantes des collectivités locales

[2] C’était la principale critique que nous avions formulée alors : http://www.transparence-france.org/e_upload/pdf/cp_rapport_commission_de_reflexion_260111.pdf

[3] Directions d’administrations centrales, d’établissements publics et d’agences publiques notamment.

[4] Elle reprendrait également les missions de la Commission pour la transparence financière de la vie politique chargée de recueillir les déclarations de patrimoine, et de la Commission de déontologie de la fonction publique. 
 

François Bayrou confirme son engagement à moraliser la vie publique

Rappelant sa volonté d’organiser un référendum sur la moralisation de la vie publique, François Bayrou s’engage sur nos 7 propositions pour une véritable éthique de l’action publique

Deux points attirent notamment notre attention. Reconnaissant l’importance d’une justice indépendante, le candidat du MoDem souhaite que la nomination du Garde des Sceaux soit « soumise à l’approbation d’une majorité qualifiée du Parlement devant qui il sera responsable et par qui il pourra être censuré ». Sur la question du lobbying, il rappelle que, s’il est élu, les groupes de pression et les réseaux d’intérêt trouveront à l’Élysée porte close.  

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