Gouvernement ouvert : le plan d’action de la France achoppe sur la question du lobbying

La France a présenté hier son plan d’action dans le cadre du Partenariat pour un gouvernement ouvert qu’elle a rejoint il y a tout juste un an. Ce plan d’action définit la stratégie de la France en matière d’ouverture des données publiques.

Il comprend un ensemble d’avancées en matière de transparence, de redevabilité et de participation citoyenne.

Transparency International France, qui a participé au processus de consultation, déplore cependant que la transparence du lobbying soit totalement absente du plan d’action.

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Le déontologue de l’Assemblée nationale propose d’asseoir le dispositif déontologique

Nommé en avril 2014, Ferdinand Mélin-Soucramanien, déontologue de l’Assemblée nationale, a remis hier au président de l’Assemblée son premier rapport annuel

Intitulé « Les progrès de la déontologie à l’Assemblée nationale », le rapport note une amélioration du « climat éthique » à l’Assemblée nationale liée, d’une part, aux nouvelles règles mises en place ces dernières années – lois sur la transparence, modification du Règlement de l’Assemblée, réforme de l’indemnité représentative de frais de mandats – et d’autre part, à la prise en compte par les députés de la nécessité d’être plus vigilants, conformément aux attentes des citoyens.

Le déontologue dresse également le bilan de ses activités de conseil et des réponses apportées aux députés sur différentes questions (cumul d’activités, en particulier d’avocats, possibles situation de conflits d’intérêts, participation rémunérée à des conférences ou à des clubs parlementaires…). 

Enfin, le déontologue formule une série de propositions visant à modifier le code de déontologie afin de regrouper l’ensemble des règles aujourd’hui éparpillées entre différents textes et décisions du Bureau. Il propose également de renforcer le rôle et le statut du déontologue et suivre ainsi l’évolution de ses missions. 

Modification du code de déontologie :

1 – Actualiser la décision du Bureau de l’Assemblée nationale du 6 avril 2011. Cette décision a créé la fonction de déontologue, mais elle s’avère aujourd’hui obsolète ;

2 – Ouvrir aux députés la possibilité de déclarer oralement leurs intérêts personnels dans le cadre d’un débat. Ce ne serait cependant pas une obligation ;

3 et 4 – Renforcer les principes devant régir l’exercice par les députés de leur mandat en inscrivant, dans le code de déontologie, l’existence d’un devoir de vigilance et un devoir d’exemplarité ;

5 – Réunir dans le code de déontologie l’ensemble des obligations déclaratives (cadeaux, invitations, voyages, utilisation de l’IRFM) et préciser la mise en oeuvre de ces obligations ;

6 – Ouvrir aux fonctionnaires de l’Assemblée nationale et aux collaborateurs des députés la faculté de saisir le déontologue ;

Nouvelles missions et statut du déontologue :

7 – Garantir l’effectivité de l’article 80-5 du Règlement de l’Assemblée nationale donnant au déontologue un droit de regard sur le registre des représentants d’intérêts. Le rapport propose de confier explicitement au déontologue un rôle d’alerte en cas de comportements inappropriés de la part de représentants d’intérêts ainsi que la possibilité d’ouvrir une réflexion sur la mise en place de contrôles aléatoires sur les inscriptions au registre ;

8 – Compléter le statut du déontologue afin de permettre que cette fonction soit assurée à plein temps. Le modèle québécois du « Commissaire à l’éthique et la déontologie » pourrait être source d’inspiration ; 

9 – Soumettre le déontologue à l’obligation de transmettre une déclaration d’intérêts et d’activités à la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP). Ayant déjà transmis la sienne aux présidents de la HATVP et de l’Assemblée nationale, il souhaite que cette bonne pratique soit inscrite dans la loi ;

10 – Clarifier ses rapports avec la Haute autorité pour la transparence de la vie publique

Ces propositions, si elles sont mises en place, permettront de clarifier utilement le dispositif déontologique de l’Assemblée nationale et accompagner ainsi l’évolution de certaines pratiques. 

Rappelons que le déontologue de l’Assemblée nationale est une fonction unique, créée en 2011, qui n’existe pas au Sénat. La Haute assemblée a préféré créer un comité de déontologie, composé uniquement de sénateurs, aux missions moins larges. 

>> En savoir plus sur les règles déontologiques auxquelles sont soumis les députés 

Conditions d’exercice d’un mandat politique et transparence du lobbying : les propositions innovantes du rapport sur l’exemplarité des responsables publics

Le rapport sur l’exemplarité des responsables publics, remis par Jean-Louis Nadal au Président de la République, formule 20 propositions, dont plusieurs innovantes, visant à répondre aux affaires qui ont émaillé l’actualité récente (Cahuzac, Thévenoud, Bygmalion). Si ces propositions sont adoptées – certaines devant l’être par voie législative ou règlementaire, d’autres (les plus innovantes) via une réforme constitutionnelle –, elles devraient permettre d’éviter ou, dans certains cas, de mieux gérer les affaires lorsqu’elles surviennent.

Ce rapport reprend ainsi plusieurs des recommandations formulées par Transparency International France, notamment concernant l’encadrement du lobbying et la possibilité pour les assemblées de destituer un de leurs membres en cas de manquement grave à la probité. Parmi les principales recommandations de Transparency France qui ont été suivies :

– La  possibilité pour les assemblées de destituer certains de leurs membres en cas de manquement grave à l’exemplarité (ce qui devrait nécessiter une réforme constitutionnelle) ;

– La vérification de la situation fiscale des ministres avant leur nomination (ce que nous demandions dès 2013)

– La délivrance d’un certificat de régularité fiscale pour les candidats à une élection nationale

– La possibilité d’ajouter un critère d’inéligibilité dans les conditions pour se présenter à une élection qui porterait sur des atteintes graves à la probité (ce qui nécessite une réforme constitutionnelle).

– Les propositions en matière d’encadrement du lobbying qui préconisent de définir ce qu’est la représentation d’intérêts et qui sont les lobbyistes. Autre proposition d’importance et qui n’avait encore jamais été formulée aussi clairement et largement, l’introduction d’une empreinte normative (publication de la liste des personnes entendues, des réunions et auditions organisées, des consultations menées et des contributions reçues) à toutes les phases du processus de décision publique. L’introduction d’une telle mesure constituerait un réel progrès en matière de traçabilité de la décision publique. Le rapport propose également d’instaurer un registre obligatoire des représentants d’intérêts au niveau du Gouvernement avec l’objectif de le fusionner à terme avec celui des assemblées. Le rapport précise, à juste titre, que ces deux propositions sont complémentaires, l’une ou l’autre ne pouvant suffire à elle seule.

– La création d’un réseau de déontologues et mise en place des chartes de déontologie et de formation dans les administrations et les collectivités.

Si ce rapport constitue indéniablement un marqueur de progrès, Transparency France regrette que les propositions n’aient pas été plus ambitieuses concernant les règles applicables aux parlementaires, notamment concernant l’usage de leurs indemnités ou la gestion des conflits d’intérêts. Le rapport propose uniquement « d’engager une réflexion » sans formuler de propositions concrètes. Rappelons qu’un rapport avait déjà été rendu sur le sujet de l’IRFM par l’ancienne déontologue Noëlle Lenoir, mais les préconisations de ce rapport n’ont eu aucune suite.

Par ailleurs, aucune proposition n’est faite concernant les activités professionnelles annexes exercées par les parlementaires (pas de plafond pour les revenus tirés de ces activités) ou encore sur la gestion des conflits d’intérêts (déclaration orale des intérêts et déport). Enfin, le rapport ne revient pas sur la nécessité d’instaurer un véritable contrôle des comptes de l’Assemblée nationale et du Sénat par la Cour des comptes (contrôle de gestion) comme elle peut le faire pour l’Élysée et non une simple certification.

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