Transparency France auditionné sur le financement des campagnes électorales et des partis politiques

Le 7 avril 2015, nous avons été auditionnés à l’Assemblée nationale par Romain Colas, rapporteur spécial de la Commission des finances, dans le cadre de ses travaux d’évaluation du cadre juridique du financement des campagnes électorales et des partis politiques. A cette occasion, nous avons réalisé un état des lieux et formulé des recommandations pour renforcer le dispositif. 

Les partis politiques sont les organisations qui font l’objet de la défiance la plus élevée de la part des citoyens avec seulement 11% des Français qui déclarent leur faire confiance (Baromètre de la confiance politique du CEVIPOF – janvier 2014). 

Cette défiance peut s’expliquer par les différentes « affaires » et polémiques qui ont émaillé l’actualité de ces dernières années : affaire Bygmalion, enquête sur le micro-parti Jeanne, soupçons de détournement des fonds du groupe UMP au Sénat, enquête sur le financement du FN via la rémunération d’assistants parlementaires européens, prêts accordés par des institutions financières étrangères…

Pourtant, la France dispose, sur le papier, de l’une des législations les plus avancées en Europe en matière de financement de la vie politique. Depuis 1988 et à la suite de divers scandales de financement occultes, plusieurs lois ont été adoptées afin d’assurer la transparence du financement des partis et des campagnes électorales et de limiter les risques de corruption.

Ces affaires sont  révélatrices de certaines défaillances et, notamment, de l’insuffisance du contrôle exercé sur les comptes des partis. Ainsi, la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) ne dispose par exemple pas de moyens d’investigation. Selon nous, c’est moins la législation qui est en cause que les moyens mis en place pour garantir son application. 

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Incriminations et financement des partis politiques en France : une mise en oeuvre insatisfaisante pour le GRECO

Le Groupe d’Etats contre la corruption (GRECO) a publié le 12 mars 2015 un rapport sur les incriminations et le financement de la vie politique en France.

Il s’agit d’un rapport intermédiaire qui fait suite au deuxième Rapport de conformité publié en novembre 2013. Ce dernier, publié avant l’adoption des lois post-Cahuzac, ne prenait pas en compte les évolutions législatives de 2013. A ce jour, la France a mis en œuvre (ou traité) de façon satisfaisante, seulement 5 des 17 recommandations du GRECO. S’agissant des 12 recommandations restantes, 10 ont été partiellement mises en œuvre et 2 n’ont pas été mises en œuvre. Le GRECO conclut que le niveau actuel de mise en œuvre reste “globalement insatisfaisant”.

S’agissant des incriminations, le GRECO note une avancée partielle sur la question de la prescription de par une décision jurisprudentielle importante rendue en novembre 2014. Mais globalement, il regrette une nouvelle fois l’absence de toute avancée significative.

S’agissant de la transparence du financement politique, le GRECO note avec satisfaction que la HATVP est entrée en existence au cours du premier semestre 2014 et que le nouveau dispositif génère d’ores et déjà quelques « mises au point » dans des cas individuels d’élus. Il s’agit là du seul progrès tangible qui permette de noter un progrès dans la mise en œuvre d’une des recommandations. Pour le reste, le GRECO regrette qu’aucune autre mesure ni réforme d’envergure n’ait été prise pour répondre aux attentes des recommandations encore pendantes (notamment dans les moyens de contrôle de la CNCCFP).

Ce rapport se présente comme un « carnet des échanges » entre le GRECO et les autorités françaises : le GRECO rappelle sa recommandation, les explications apportées par les autorités françaises (souvent, les mêmes que celles apportées pour le rapport 2013) et sa conclusion/recommandation. 

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Conditions d’exercice d’un mandat politique et transparence du lobbying : les propositions innovantes du rapport sur l’exemplarité des responsables publics

Le rapport sur l’exemplarité des responsables publics, remis par Jean-Louis Nadal au Président de la République, formule 20 propositions, dont plusieurs innovantes, visant à répondre aux affaires qui ont émaillé l’actualité récente (Cahuzac, Thévenoud, Bygmalion). Si ces propositions sont adoptées – certaines devant l’être par voie législative ou règlementaire, d’autres (les plus innovantes) via une réforme constitutionnelle –, elles devraient permettre d’éviter ou, dans certains cas, de mieux gérer les affaires lorsqu’elles surviennent.

Ce rapport reprend ainsi plusieurs des recommandations formulées par Transparency International France, notamment concernant l’encadrement du lobbying et la possibilité pour les assemblées de destituer un de leurs membres en cas de manquement grave à la probité. Parmi les principales recommandations de Transparency France qui ont été suivies :

– La  possibilité pour les assemblées de destituer certains de leurs membres en cas de manquement grave à l’exemplarité (ce qui devrait nécessiter une réforme constitutionnelle) ;

– La vérification de la situation fiscale des ministres avant leur nomination (ce que nous demandions dès 2013)

– La délivrance d’un certificat de régularité fiscale pour les candidats à une élection nationale

– La possibilité d’ajouter un critère d’inéligibilité dans les conditions pour se présenter à une élection qui porterait sur des atteintes graves à la probité (ce qui nécessite une réforme constitutionnelle).

– Les propositions en matière d’encadrement du lobbying qui préconisent de définir ce qu’est la représentation d’intérêts et qui sont les lobbyistes. Autre proposition d’importance et qui n’avait encore jamais été formulée aussi clairement et largement, l’introduction d’une empreinte normative (publication de la liste des personnes entendues, des réunions et auditions organisées, des consultations menées et des contributions reçues) à toutes les phases du processus de décision publique. L’introduction d’une telle mesure constituerait un réel progrès en matière de traçabilité de la décision publique. Le rapport propose également d’instaurer un registre obligatoire des représentants d’intérêts au niveau du Gouvernement avec l’objectif de le fusionner à terme avec celui des assemblées. Le rapport précise, à juste titre, que ces deux propositions sont complémentaires, l’une ou l’autre ne pouvant suffire à elle seule.

– La création d’un réseau de déontologues et mise en place des chartes de déontologie et de formation dans les administrations et les collectivités.

Si ce rapport constitue indéniablement un marqueur de progrès, Transparency France regrette que les propositions n’aient pas été plus ambitieuses concernant les règles applicables aux parlementaires, notamment concernant l’usage de leurs indemnités ou la gestion des conflits d’intérêts. Le rapport propose uniquement « d’engager une réflexion » sans formuler de propositions concrètes. Rappelons qu’un rapport avait déjà été rendu sur le sujet de l’IRFM par l’ancienne déontologue Noëlle Lenoir, mais les préconisations de ce rapport n’ont eu aucune suite.

Par ailleurs, aucune proposition n’est faite concernant les activités professionnelles annexes exercées par les parlementaires (pas de plafond pour les revenus tirés de ces activités) ou encore sur la gestion des conflits d’intérêts (déclaration orale des intérêts et déport). Enfin, le rapport ne revient pas sur la nécessité d’instaurer un véritable contrôle des comptes de l’Assemblée nationale et du Sénat par la Cour des comptes (contrôle de gestion) comme elle peut le faire pour l’Élysée et non une simple certification.

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