Déclarations de patrimoine : exercez votre droit de contrôle citoyen !

Deux ans après l’adoption des lois sur la transparence de la vie publique, la Haute Autorité pour la Transparence de la Vie Publique (HATVP) a annoncé lundi que les déclarations de patrimoine des députés et de 162 sénateurs étaient désormais disponibles en préfecture. Celles des sénateurs élus en septembre dernier, encore en cours de traitement, seront accessibles ultérieurement.

Tout citoyen inscrit sur les listes électorales peut ainsi accéder à ces déclarations qui contiennent la liste des biens immobiliers, comptes bancaires, assurances vie ou encore dettes et emprunts. L’objectif est de vérifier que les déclarants ne se sont pas enrichis de manière illicite pendant leur mandat.

Où consulter ces déclarations ? 

Pour consulter ces déclarations, il suffit de se présenter à la préfecture de la circonscription d’élection du député ou du sénateur. Il n’est pas nécessaire d’être électeur dans cette même circonscription.

Pour accompagner ce dispositif complexe, la HATVP a publié un ensemble d’infographies pédagogiques que vous trouverez ici.

Pour rappel, notre association était favorable à un dispositif plus simple, à savoir une publication en ligne comme pour les déclarations d’intérêts des élus et des membres du gouvernement. La sanction en cas de divulgation (45 000€ d’amende) est par ailleurs très forte alors que seule la publication d’informations mensongères aurait pu être sanctionnée. 

Signaler à la HATVP des déclarations incomplètes

La mise à disposition en préfecture des déclarations de patrimoine doit permettre aux citoyens d’aider la HATVP dans sa mission de détection des manquements éventuels. C’est ce que l’on appelle le contrôle citoyen.

Notre association a été la première association agréée par la HATVP pour la saisir de ces manquements (déclarations d’intérêts et de patrimoine incomplètes, conflits d’intérêts, pantouflages problématiques, incompatibilités non respectées…). 

Si vous pensez qu’une déclaration de patrimoine est incomplète, nous vous invitons à utiliser les outils que nous mettons à votre disposition pour que nous transmettions votre signalement à la HATVP.

>> En savoir plus sur nos outils 

Encadrement du lobbying à l’Assemblée nationale : les nouveaux formulaires sont en ligne. Représentants d’intérêts, inscrivez-vous !

Annoncés le 1er octobre, date d’entrée en vigueur du nouveau dispositif d’encadrement du lobbying à l’Assemblée nationale, les nouveaux formulaires d’inscription sur le registre des représentants d’intérêts viennent d’être rendus publics. Directement inspirés de ceux en vigueur au sein des institutions européennes (Registre de transparence commun au Parlement et à la Commission), ces formulaires doivent permettre de mieux cerner l’identité et l’activité des différents groupes d’intérêts qui souhaitent rencontrer les députés.

Plusieurs des recommandations portées par Transparency International France entrent ainsi en vigueur. Le 9 octobre dernier, nous avons par ailleurs rencontré Christophe Sirugue, Président de la Délégation chargée des représentants d’intérêts et principale plume de ce nouveau dispositif, qui nous a apporté des précisions.

Un nouveau registre pour plus de transparence

Les informations fournies au nouveau registre seront mises en ligne le 1er janvier 2014. A cette date, entrera également en vigueur le nouveau code de conduite des représentants d’intérêts. Ce délai de deux mois est apparu nécessaire pour permettre aux représentants d’intérêts de s’approprier le formulaire et de s’y inscrire. L’enjeu de transparence est de taille : le registre actuel, mis en place en 2009, ne compte que 238 inscrits alors même que le nombre d’acteurs auditionnés à l’Assemblée nationale se compte en milliers (voir notre étude sur l’influence à l’Assemblée nationale réalisée en 2011[1]).      

Concrètement, 6 formulaires sont mis à disposition pour chaque type de représentant d’intérêts : sociétés de conseil, entreprises privées, organisations professionnelles et syndicats, ONG et associations, groupes de réflexion, organismes de recherche ou universitaires, autorités administratives et organismes publics. Le filtre de la précédente Délégation chargée des représentants d’intérêts, dont nous avons regretté à plusieurs reprises l’opacité des décisions et des critères, sera supprimé : l’inscription, réalisable en ligne, sera automatique.

Conformément à une proposition que nous portions depuis des années, une typologie plus fine des acteurs a été définie. Une distinction est par exemple opérée entre syndicats, associations professionnelles et ONG. Dans le registre actuel, ces différents types d’acteurs sont regroupés dans une même catégorie « Associations ».  En revanche, le statut des associations d’élus, très présentes, reste à suivre.

Autre nouveauté, des informations précises sur les activités conduites annuellement en matière de lobbying devront être renseignées (dossiers législatifs sur lesquels ont porté les activités et détail de celles-ci : auditions, rédactions d’argumentaires, réunions, colloques, etc.), de même que sur les budgets consacrés. Les sociétés de conseil devront également indiquer le nom de leurs clients et les budgets par secteur. De même, tous les acteurs devront indiquer leurs sources de financement.

Pour éviter un faible nombre d’inscrits, l’Assemblée nationale a souhaité valoriser ceux qui feront la transparence. D’une part, un système d’alerte a été créé ainsi que la possibilité de mettre en ligne sa contribution sur un portail Internet dédié. Les députés et rapporteurs seront invités par courrier à consulter ces contributions[2]. D’autre part, conformément à l’une de nos suggestions, ce nouveau registre valorisera les bonnes pratiques déjà adoptées par certains acteurs. Par exemple, les entreprises qui se sont dotées d’une charte de lobbying pourront y faire référence dans le registre.

En cas de manquement, le représentant d’intérêts sera exclu du registre. Les citoyens auront là un rôle important à jouer puisqu’ils pourront porter à la connaissance de la Délégation chargée des représentants d’intérêts d’éventuels manquements.

Rappelons néanmoins que l’inscription sur le registre ne sera toujours pas obligatoire[3].

Des règles qui visent aussi les députés, garants de l’intérêt général et agissant sur fonds publics

Une recommandation, portée par Transparency International France depuis le début, a été adoptée : outre ce nouveau registre, une instruction générale du Bureau, adoptée le 1er octobre, instaure l’obligation pour les députés de mentionner dans les rapports parlementaires la liste de l’ensemble des auditions menées par le rapporteur. Si aucune audition n’a été réalisée, le rapport devra le signaler. Cette obligation découle directement de l’un des principaux constats de notre étude sur l’influence à l’Assemblée nationale : 62% des rapports analysés ne comportaient aucune mention des personnes et organisations auditionnées.

Le nombre de collaborateurs bénévoles sera limité à deux par député afin d’empêcher que certains représentants d’intérêts bénéficient de badges permanents. Toute demande de badge de collaborateur bénévole ne sera autorisée que « pour des raisons familiales, pour des stagiaires ou, éventuellement, en lien avec un mandat local ou une responsabilité dans un organisme extérieur. »

Enfin, l’organisation de colloques à l’Assemblée sera mieux encadrée. Il sera désormais interdit d’organiser des colloques à l’Assemblée dans lesquels les participants interviennent parce qu’ils ont payé.

Un dispositif évalué tous les ans, une recommandation portée par Transparency International depuis le début 

Au-delà de ces nouvelles dispositions, le point sur lequel notre association accorde aussi beaucoup d’importance est la démarche de progrès dans laquelle Christophe Sirugue nous a assuré s’inscrire. Ainsi que nous le demandons depuis 4 ans, une évaluation du dispositif sera réalisée chaque année avec la publication d’un rapport annuel. Le dispositif a donc vocation à être amélioré au fil du temps, au regard des pratiques constatées. Nous souhaitons que cette évaluation soit faite de manière concertée.

A suivre

Nous réitérons certaines de nos recommandations, notamment les règles applicables aux parlementaires :

– L’inscription enfin dans le Règlement de l’Assemblée (la loi intérieure de l’Assemblée) de la question du lobbying et de son encadrement.

La mise en ligne par les parlementaires de l’agenda de leurs rencontres avec des représentants d’intérêts (empreinte individuelle) afin que  les citoyens puissent y avoir accès.

– La publication de l’ensemble des contributions transmises aux parlementaires, y compris celles adressées par des groupes d’intérêts non inscrits sur le registre. La transparence doit s’appliquer aux positions de toutes les personnes et organisations qui souhaitent prendre part au débat public, en faisant valoir ses informations et arguments.

– La mise en place un code de déontologie pour les collaborateurs parlementaires et les fonctionnaires des assemblées. Au cours des débats autour des projets de loi sur la transparence de la vie publique, Jean-Jacques Urvoas, rapporteur des textes, avait indiqué que des propositions avaient été transmises au Bureau de l’Assemblée. Nous appelons le Bureau de l’Assemblée et les députés à les mettre en œuvre.

– Le renforcement du principe selon lequel ce qui se passe dans les assemblées l’est sous le regard des citoyens : un mécanisme de plainte, en cas de dérives, devrait être formalisé sur le modèle de celui qui existe au niveau des institutions européennes.

L’adoption enfin d’un dispositif commun à l’Assemblée nationale et au Sénat. Il n’est pas normal d’avoir, en France, des règles différentes d’une assemblée à l’autre.

Un dispositif qui doit être étendu à tous les acteurs publics

La question de l’encadrement du lobbying se posant pour l’ensemble des acteurs participant à l’élaboration des décisions publiques (Sénat, cabinets ministériels, administrations centrales, agences nationales, lieux d’expertise…), nous les invitons à s’inspirer de l’Assemblée nationale et à se doter aussi de règles devant permettre de garantir l’équité d’accès aux décideurs publics, d’assurer l’intégrité des échanges, de publier les informations reçues, et la traçabilité de la décision publique. Notre association sera particulièrement vigilante sur les lignes directrices qui devront être établies par la Haute autorité pour la transparence ainsi que par leur mise en œuvre par l’ensemble des lieux de la décision publique.

L’ensemble des représentants d’intérêts (entreprises, cabinets de conseil, associations professionnelles, ONG, syndicats, think tank, autorités indépendantes…) est invité à s’inscrire sur ce nouveau registre.

Alors que de plus en plus de professionnels du lobbying s’expriment pour faire part de leur engagement en faveur d’un lobbying responsable, ils ont aujourd’hui l’occasion de passer des paroles aux actes !

Enfin, les parlementaires sont invités désormais à distinguer activement les acteurs qui font la transparence sur leur identité, leur activité et leurs positions et à concourir eux-mêmes au renforcement de la transparence afin de restaurer la confiance.


[1] Avec Regards Citoyens

[2] Christophe Sirugue nous a indiqué que le Bureau de l’Assemblée nationale allait adresser un courrier à tous les députés pour leur faire connaître le dispositif et les inviter à consulter le registre.

[3] Dans nos bilans publiés en 2010 et 2011 sur le dispositif de l’Assemblée nationale, nous avions montré l’échec du registre : très peu de lobbyistes étaient enregistrés du fait de l’absence d’avantages à s’y inscrire.

>> Retrouvez tous nos travaux sur l’encadrement du lobbying à l’Assemblée nationale

 

Transparence : la députée Barbara Romagnan publie l’utilisation des moyens matériels et financiers mis à sa disposition

La députée PS Barbara Romagnan était intervenue lors de notre colloque consacré à la déontologie parlementaire et avait expliqué pourquoi il fallait limiter le cumul des mandats. Partisane du mandat parlementaire unique, elle a, dès après son élection à l’Assemblée, démissionné de son mandat de conseillère générale du Doubs (mandat non exécutif).

Le 13 juin dernier, elle nous a écrit pour nous informer de la mise en oeuvre des engagements qu’elle avait pris envers ses électeurs en matière de moralisation de la vie publique.

Comme elle en avait fait la promesse, elle a ainsi rendu public l’usage qu’elle a fait des 130 000 euros qui lui ont été attribués en 2013 au titre de la réserve parlementaire (accessible ici), ainsi que des moyens matériels et financiers mis à sa disposition pour exercer son mandat. 

Ces informations sont disponibles dans le document téléchargeable ici